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CENTRAFRIQUE – CONFLIT : Un journaliste américain explore les méandres de Wagner

Date de publication : février 18, 2025
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Les activités subversives et lugubres du groupe paramilitaire Wagner en République centrafricaine ont été révélées dans le monde à travers divers canaux de communication. En novembre 2024, un journaliste Centrafricain, Ephrem Ngonzo Yaliké, a parlé à RFI des pratiques russes liées à la désinformation et aux discours de haine contre les institutions internationales. John Lechner , a écrit un livre qui révèle les dessous des négociations entre Evgueni Prigozhin, le fondateur du groupe Wagner, décédé dans un crash d’avion en août 2024, et les chefs des groupes armés qui sévissaient sur le territoire centrafricain, en marge des négociations politico-militaires préalables à l’accord de Khartoum signé le 6 février 2019 à Bangui.

 

Le titre du livre de John Lechner « Death is our Business » en anglais (la mort est notre affaire), va paraître le 4 mars prochain aux éditons britanniques Bloomsbury Publishing. A l’issue d’ investigations fouillées , l’auteur va même jusqu’à révéler les montants précis des sommes d’argent et autres équipements, pourtant secrètement versés par le défunt patron du groupe Wagner, Evgueni Prigozhin qui a dépensé en tout plus d’un (1 million) de dollars US pour soudoyer les principaux chefs de groupes rebelles. C’est d’ailleurs à bord d’un avion spécial de Wagner que ces derniers ont été transportés de Bangui à Khartoum, lieu des pourparlers. Les représentants du gouvernement centrafricain quant à eux, ont rejoint Khartoum par un aéronef d’Ethiopian Airlines affrété à cet effet.

 

L’argent qui a acheté les seigneurs de guerre

 

On apprend ainsi et surtout pour la première fois dans le livre que la somme de cinq cents milles dollars US, (500.0000) a été versée à Noureddine Adam, du Front dit populaire pour la renaissance de la Centrafrique, pour qu’il se retire de son quartier général de la localité de Ndélé et ses environs. Les autres seigneurs de guerre ont perçu un peu moins. Ali Darassa Mahamat, par exemple, chef du tristement célèbre groupe armé, Union pour la Paix en Centrafrique (UPC), s’est contenté de deux cents cinquante milles dollars (250 000) US dollars. Hassan Bouba, son bras droit à l’époque et actuel ministre de l’élevage et intermédiaire privilégié des miliciens de Wagner, n’a reçu que soixante milles (60 000) US dollars, un carton de pistolets 9 mm turcs et deux cents 200 téléphones Android. Mahamat Al-Khatim, le leader du Mouvement dit patriotique pour la Centrafrique, a été payé cent milles (100.000) US dollars. Maxime Mokom, un des leaders anti-balaka très proche de l’ancien président, le général François Bozizé Yangouvonda, Abdoulaye Hissène, un ancien chef de guerre du FPRC, ont eu chacun cinquante milles (50.000 ) US dollars.

 

L’attaque surprise de la ville de Bambari le jour de la célébration en différé de la Journée Mondiale de l’Alimentation (JMA) le 10 janvier 2019, alors que les habitants se préparaient à fêter, des coups de feu de toutes sortes ont crépité dans la ville semant la panique chez les habitants et le désarrois et les officiels qui ont décidé du report de la fête. D’après les dirigeants de Wagner à Bangui, cette offensive aurait été imputée à des mercenaires venant du Tchad. En réalité, il s’agissait plutôt des membres du groupe armé UPC d’Ali Darassa qui ont lancé l’attaque a rapporté un reporter lors d’une rencontre avec certains délégués de Wagner à Bangui, quelques jours après l’attaque du 10 janvier. Ce récit du journaliste n’a pas été bien apprécié par les responsables de Wagner qui ont cru devoir organiser exprès une réunion afin de briefer les journalistes pour les dissuader d’indexer les membres de l’UPC comme les auteurs des coups de feu de l’attaque du 10 janvier 2019 à Bambari, mais des mercenaires.

 

Wagner champion de la désinformation et de la manipulation

 

Les supplétifs russes voulaient que les journalistes centrafricains protègent le nom d’Ali Darassa, avec qui ils ont signé un contrat. Ces quelques mots viennent attester de l’accord conclu entre l’ancien dirigeant des Wagner, Evgueni Prigozhin, et Ali Darassa. Il était nécessaire de le défendre bien que ses membres aient commis des atrocités contre les populations civiles dans les régions qu’ils avaient prises possession. Hassan Bouba, libéré des geôles du camp de RouxHassan Bouba, l’ex-assistant d’Ali Darassa et maintenant ministre de l’élevage, a été interpellé le 19 novembre 2021 suite à une demande de la Cour pénale spéciale (CPS) pour des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis quelques années plus tôt. Il a été exfiltré de sa détention par la gendarmerie et des mercenaires de Wagner le 26 novembre 2023 suite aux instructions des autorités gouvernementales. Cette action des éléments de Wagner est conforme au deal conclu avec Hassan Bouba. John Lechner révèle aussi qu’au début de leur présence en Centrafrique, outre le service des douanes que les membres de Wagner ont essayé brièvement de contrôler mais sans grand succès, les éléments de Prigozhin ont bénéficié des subventions de l’État sur leur carburant et la nourriture pour un montant total de trente cinq millions (35) de dollars US par an, selon le journaliste américain.

 

Don à la RCA de vieux blindés russes

 

La Russie a offert à la RCA 20 véhicules blindés de modèle BRDM, fabriqués en Russie et sortis des ateliers de l’armée russe après quelques réparations de carrosserie. Le 15 octobre 2020, à l’aéroport international Bangui – M’Poko, la première série de 10 véhicules blindés a été livrée en présence de Faustin Archange Touadéra, président de la République Centrafricaine. À présent, la plupart de ces chars ne sont plus en état de fonctionner. Quelques-uns sont tombés en panne lors de leur transfert à Berengo.

 

Pour permettre le mouvement de ces anciens chars, le gouvernement a alloué environ 100 millions FCFA pour le carburant avec un avenant. Un montant considérable qui n’a pas plu à certains responsables du ministère des Finances de l’époque. Henri Marie Dondra, alors ministre des Finances, s’est beaucoup plaint de la forte pression des responsables de Wagner sur les caisses du trésor national pour se faire payer, n’étant pas en mesure de s’opposer à la directive gouvernementale, a ordonné à ses équipes de prendre les dispositions nécessaires pour transférer cet argent aux Russes en vue de l’acquisition du carburant.

 

Le livre « Death is our Business », qui va paraître le 4 mars prochain, mettra une fois de plus en évidence les mauvaises pratiques du groupe Wagner en République centrafricaine, savoir faire transposé depuis lors dans plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest, naguère dominés par la France mais actuellement évoluant sous la férule du Kremlin. Désinformation, discours de haine, manipulations grotesques, exploitations anarchiques des ressources forestières et du sous-sol (bois, or, diamant) constituent les principales actions du groupe Wagner pour se positionner en maître et s’imposer en République centrafricaine.

 

La peur au ventre

 

Les autorités centrafricaines ont peur des mercenaires de Wagner et se trouvent en mauvaise posture pour critiquer certaines exactions commises par leurs membres sur les populations civiles, les responsables locaux et administratifs, ainsi que sur les institutions internationales.

 

Effectivement, l’intervention des groupes Wagner en Centrafrique a certes contribué à rétablir la paix et la libre circulation dans certaines zones occupées hier par les groupes armés signataires de l’Accord Politique pour la Paix et la Réconciliation en République Centrafricaine (APPR-RCA). En parallèle, les mercenaires de Wagner ont perpétré et continuent de commettre de nombreux abus et exactions qui ne sont condamnés et dénoncés que par diverses organisations de la société civile centrafricaine et des ONGs internationales dédiées à la défense des droits de l’homme.

 

Le 4 mars prochain, le livre « Death is our Business » sera publié et exposera à nouveau les agissements douteux voire criminels et le vrai visage des mercenaires du groupe Wagner en République centrafricaine. Ce groupe s’affirme comme un acteur économique dominant mais paradoxalement n’est nullement soumis aux obligations fiscales du pays. Wagner brille principalement par la désinformation, l’incitation à la haine, les manipulations médiatiques de toutes sortes et la volonté insatiable d’exploiter anarchiquement les ressources minières et forestières dont regorge la République centrafricaine telles que l’or, le diamant et le bois. Ces mercenaires, afin de casser son marché et l’éjecter du pays, ont mis nuitamment le feu par bouteilles de cocktail molotov à l’unique brasserie du pays appartenant au groupe français Pierre Castel installée à Bangui depuis les années soixante, incendie qui a détruit plus de deux milles emballages de boisson. En outre, ils se sont lancés dans la fabrication sauvage d’une bière qu’ils ont dénommée “Africa ti l’or” en langue nationale sango, Afrique en or en Français et d’une piètre copie frelatée de la vodka russe qui fait des ravages chez certains consommateurs.

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