La Centrafrique est profondément divisée depuis l’adoption de la nouvelle constitution du 30 Aout 2023 qui consacre la notion de la centrafricanité. Seule, les centrafricains d’origine sont et doivent être promus à des postes de responsabilité civile et militaire. Les candidats binationaux ne seront pas candidats aux élections présidentielles écartant ainsi plusieurs figures de l’opposition.
Dans son rapport présenté aujourd’hui à Genève, l’expert indépendant de l’ONU sur le dossier centrafricain, a abordé plusieurs questions et recommande aux autorités de Bangui d’ouvrir un dialogue franc autour de cette problématique.
L’inquiétude
« Il y a également toujours sur le plan politique, un projecteur qui est fait sur la nouvelle constitution du 30 Aout 2023 sous l’angle des droits de l’Homme bien évidemment et je relève qu’il y a une notion qui potentiellement est porteuse de conflit futur. J’entends la notion de centrafricain d’origine. C’est une notion qui mérite d’être clarifiée dans un dialogue que j’appelle les autorités à engager avec l’ensemble de la classe politique mais également avec la société civile et les autres institutions » a indiqué à Gavroche RCA Yao Agbetsé, expert indépendant de l’ONU.
Alors que la République Centrafricaine s’apprête à aller aux élections locales et régionales, l’opposition démocratique représentée par le bloc des républicains pour la défense de la constitution refuse d’y prendre part mettant en avant cette disposition qui selon elle divise les centrafricains. C’est dans ce contexte que l’expert de l’ONU appelle à un dialogue.
« Dans le contexte actuel de la RCA, le dialogue est l’outil primordial pour que l’ensemble des fils, que ce soit les partis de l’opposition ou de la majorité puissent s’asseoir, échanger et discuter pour retrouver la confiance. Et donc moi j’appelle les autorités à résolument s’engager sur la voie du dialogue de confiance avec l’opposition mais également avec la société civile. Sans dialogue, rien n’est possible. Pour les élections de 2025, il urge aujourd’hui que ce dialogue soit amorcé et j’invite l’opposition à faire un pas et les tensions actuelles à contribuer à l’amélioration des droits de l’Homme que tous les Centrafricains et Centrafricaines appellent de leurs vœux » a-t-il lancé.
Outre cette question qui divise la classe politique, ce rapport met en cause les groupes armés, les forces de défense et de sécurité mais aussi les forces bilatérales russes. Yao Agbetsé plaide pour l’impunité zéro contre ceux qui ont commis des violences contre les civils.
« Il y a quatre acteurs qui sont auteurs de violation des droits de l’Homme. Il y a les groupes armés notamment la CPC, il y a les forces de défense et de sécurité malheureusement mais également les forces bilatérales. Et les forces bilatérales russes surtout commettent des violations sur les populations civiles mais également sur les personnes dépositaires de l’autorité de l’Etat à l’intérieur du pays. Dans les provinces plusieurs témoignages concordants font état de manière systématique ou des actes de représailles contre des personnes supposément considérées comme ayant collaboré avec les groupes armés. Et donc ces comportements ne sont pas de nature à contribuer à la réalisation des missions des forces bilatérales russes » a lancé Yao Agbetsé avant d’ajouter.
« Pour moi il est important que toute allégation de violation puisse faire l’objet d’enquête de la part des autorités et les dispositions soient prises pour que les victimes aient accès à la justice et faire en sorte que tout manquement au principe du droit international de la part des forces bilatérales russes notamment, puisse et que des mesures soient prises pour que l’impunité ne soit garantie à ces personnes » a-t-il souligné.
Le gouvernement n’a pas encore réagi à ce rapport et l’expert togolais d’appeler la Minusca à faire le transfert de compétence aux autorités administratives en matière des droits tout en demandant à la CEDEAO et la Guinée Bissau de livrer l’ancien président centrafricain à la justice nationale conformément au mandat d’arrêt international lancé contre lui par la Cour Pénale Spéciale.