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CENTRAFRIQUE – SOCIAL : Les travailleurs pris en étau par la flambée du coût de la vie

Date de publication : mai 2, 2025
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C’est dans un climat de morosité que les travailleurs centrafricains vont célébrer la fête du travail 2025. Mais devant l’absence de vie à la bourse du travail, c’est le chaos social qui s’installe face aux leaders des centrales syndicales qui prônent un silence de cathédrale. Nous nous sommes posé la question de savoir que reste-il de la lutte ouvrière aujourd’hui ? En réponse à cette question qui n’en est pas pas une, Noël Ramadan, secrétaire général de l’Union Syndicale des travailleurs de Centrafrique nous donne quelques précisions.

 

« C’est vrai c’est une question qui mérite d’être posée parce que ceux qui ont connu le mouvement ouvrier centrafricain à un moment donné de notre histoire, comparativement à la situation d’aujourd’hui, on pense que le syndicat est inexistant. Mais je ne pense pas car le syndicat est encore en vie. Mais peut être les méthodes ne sont plus les mêmes car le contexte n’est peut être pas le même » a-t-il fait savoir.

 

Les leaders syndicaux lassés et dépassés par les événements

 

« Ce qui nous fragilise un peu dans le mouvement ouvrier en Centrafrique, c’est la prolifération des organisations syndicales qui poussent comme des champignons, même comme des mauvaises herbes sans une culture syndicale au préalable, et ces organisations naissent comme ça. Aussi le gouvernement est pleinement responsable parce que le gouvernement laisse faire. Parce qu’auparavant les organisations syndicales obéissaient à un certain nombre de règles. Aujourd’hui ces règles là ne sont pas strictement respectées. Il suffit d’avoir un papier de reconnaissance qui vous permet d’attendre un peu et après les gens commencent à œuvrer » a soutenu Noël Ramadan.

 

L’ombre de la politique qui pollue l’esprit de la lutte

 

Une bonne guerre ? Nous ne le pensons pas mais les syndicats sont catégoriques.

 

N’est ce pas que c’est un moyen mis en œuvre par l’Etat pour contrôler l’appareil syndical ?

 

N R : « On ne se trompe pas de ce côté là parce qu’en termes de nombre, nous avons un nombre assez important d’organisations syndicales mais en terme de qualité c’est à dire les organisations qui répondent aux critères de défense des intérêts des travailleurs vous n’en trouvez pas beaucoup » insiste le progressiste avant d’ajouter que :

 

« Et le gouvernement fait ça pour faire le contre poids et ils sont en nombre important mais qui réellement n’ont pas d’assise sur le plan national. Ce sont celles là qui sont prêtes à contrecarrer les actions de celles qui veulent organiser un certain nombre de chose ».

 

Ce malaise soulève aussi un autre aspect. C’est celui de l’espace politique et civique dans le pays.

 

En quoi le rétrécissement de l’espace politique et civique affaiblit il la lutte syndicale en République Centrafricaine?

 

N.R : « En réalité de mon point de vue les organisations les plus anciennes, nous avons fait preuve de compréhension à un moment donné parce qu’avec la lutte syndicale tout dépend du contexte. Avec la crise que nous avons connue dernièrement depuis 2013, nous nous sommes dit que quel que ce soit le tissu économique, social ou sécuritaire, il y a beaucoup de paramètres qui entrent en ligne de compte. Les syndicats responsables ont trouvé necessaire à un moment donné nécessaire d’accompagner le gouvernement dans la lutte pour le rétablissement de la sécurité, pour faire en sorte que le travail reprenne ici et là. Mais le gouvernement pense peut-être qu’en voulant l’accompagner pour que la sécurité revienne, le rythme de travail reprenne, il pense que toutes les organisations syndicales sont avec lui. Je sais qu’il y a un certain nombre de syndicats qui disent haut et fort qu’ils sont syndicats du gouvernement. Mais il n’y a aucun syndicat du gouvernement dans le monde. Toutes les organisations syndicales ne défendent que les intérêts des travailleurs. Nous posons des revendications; mais si le contexte socio économique ne permet pas de poser une revendication alors on essaie d’observer pour voir parce que cela ne sert à rien de poser une revendication lorsque vous savez pertinemment que cela ne va permettre une amélioration des conditions de vie des travailleurs. En ce moment là, on observe. En observant cela, ça ne veut pas dire que nous avons perdu la lucidité. Aujourd’hui avec les travailleurs ça ne va pas. Tout le monde souffre. Evidemment lorsque vous prenez le secteur public, on vous dira que le salaire est payé régulièrement mais ce n’est pas un indice de développement, le paiement régulier du salaire » a fait savoir l’ancien ministre de la Fonction publique et secrétaire général de l’USTC avant d’ajouter ceci.

 

« Voyez en termes de création d’emploi, création d’entreprise, les acteurs économiques centrafricains aujourd’hui, sont confrontés à beaucoup de difficultés. Les quelques rares entreprises qui existent ici en Centrafrique appartiennent presque toutes à des étrangers. On fait la part belle aux étrangers mais les nationaux, il y a un problème. Cela donne l’impression que le syndicat a démissionné. Non le syndicat ne peut pas démissionner ».

 

Le piège politique semble affaiblir la lutte

 

Beaucoup de leaders sinon tous sont promus à des postes de haute responsabilité dans les institutions. En revanche la situation sociale ne milite pas en faveur des travailleurs à l’exemple de Gabriel qui affirme « il m’est impossible de tenir le cap, payer le loyer, la scolarité des enfants et surtout, faire l’épargne. Que dire dans ce pays à l’abandon et des leaders syndicaux corrompus ? S’est il lâché.

 

Ce cris de détresse survient dans un contexte où Firmin Zoponguele du GTSC affilié au pouvoir fustige les problèmes sociaux manque d’eau et d’électricité.

 

« J’ai envie de poser cette question celle de savoir que le salaire n’a pas évolué alors que le coût de la vie a sensiblement augmenté. De l’autre côté il y a un problème d’accès à l’eau et à l’électricité. Le panier de la ménagère ne tient pas la route. Face à ce problème le syndicat est resté aphone et inaudible. Qu’est ce qui justifie cela ? Je ne pense pas que nous soyons complètement inaudibles. Nous sommes audibles à certains moments.

 

Un problème réel selon Noël Ramadan qui affirme et justifie la situation par ces termes.

 

« je ne pense pas que nous sommes complètement inaudibles à un moment donné. Je vous invite à l’occasion du 1er mai. Vous avez 6 centrales qui sont représentatives au plan national parmi lesquelles USTC parmi la trentaine que compte le pays. Cette représentation ça fait un accompagnement auprès du bureau international du travail aux côtés du ministre du travail que ce processus, on est parvenu à désigner ces centrales là qui sont des centrales les plus représentatives. Donc à l’occasion de la fête du 1er mai, nous avons réfléchi et je vous invite à être sensible sur tout ce qui est écrit sur nos banderoles » a-t-il affirmé.

 

Les préoccupations mises en veilleuses ?

 

« Les préoccupations que vous avez soulevées ici font partie de tout ce que nous avons dit. On commence par poser d’abord le problème, après s’il n’y a pas de réponse de l’employeur qu’est le gouvernement dans une certaine mesure dans le secteur privé ou para publique, en ce moment là, il faut avoir des actions. Nous sommes conscients qu’il y a un problème. Le faible pouvoir d’achat, le panier de la ménagère vide, et le peuple se meurt. Quand je parle du peuple, vous avez le travailleur salarié mais aussi des travailleurs autonomes qui travaillent pour leur compte. Les travailleurs agricoles, dans l’agriculture et l’élevage ces gens qui vivent du produit de leur travail. Aujourd’hui, ils n’en peuvent plus. Cela veut dire qu’il y a quelque chose qui ne marche pas. C’est pourquoi nous voulons poser d’abord nos revendications qui seront lues et après on se rapprochera du gouvernement pour dire que vous avez vu toutes ces panoplies de revendications, des plaintes des travailleurs qu’est-ce que vous en dites? ».

 

Le cadre de concertation une chambre à gaz sociale ?

 

Quels sont les sujets que vous avez sur la table dans le cadre permanent de échanges ?

 

N.R : « En réalité il y a beaucoup de choses dont on a discuté et nous en sommes arrivés à un niveau de protocole d’accord c’est notamment l’augmentation de salaire qui à un moment donné était à l’ordre du jour. On nous avait dit que le contexte de notre pays, le gouvernement n’avait pas les moyens pour répondre à nos préoccupations et on nous demande d’attendre un peu, ça va aller car lorsque la situation sera améliorée on ira voir comment faire majorer mais on se rend compte aujourd’hui que plus nous avançons, plus le gouvernement a des difficultés. Vous voyez ce qui se passe aujourd’hui, c’est difficile, même les petites subventions que nous retrouvons aujourd’hui pour l’organisation de la fête du travail, en dépit de l’entraînement au défilé, le gouvernement a fait des pieds et des mains pour que la fête soit, cela veut dire qu’il y a des difficultés. Nous en sommes conscients. Aujourd’hui dans les contacts avec les partenaires techniques et financiers, le gouvernement est confronté à un certain nombre de problèmes qu’il doit chercher à résoudre pour pouvoir donner effet aux exigences de ces partenaires économiques et financiers et le gouvernement de nous dire qu’on a pas les moyens politiques et financiers et nous sommes obligés de nous en tenir aux exigences de ces partenaires techniques et financiers. On en tient compte. Mais plus nous tenons compte de ça, plus le gouvernement semble prendre ça comme une faiblesse mais ce n’est pas une faiblesse. A un moment donné nous allons rejaillir et ça ne saurait tarder ».

 

Les forces extérieures Wagner et rwandaises et la situation sociale des travailleurs, les syndicats en colère.

 

À la question de Gavroche qui se demande si la situation sociale reste largement occultée par la situation secondaire à la clé, les forces étrangères (russes et rwandais) qui absorbent beaucoup d’argent constituant ainsi une clé de dépense pour le gouvernement. Discutez vous de ça aussi avec le gouvernement?

 

En réponse à cette interrogation le syndicaliste rompu ne passe pas par quatre chemin et sans ambage il dit ceci.

 

« Cette question là par ce qu’on en discute comme vous le faites maintenant. Vous me tendez le micro mais chaque fois qu’on a de rencontre avec le gouvernement, ces questions sont posées. La rareté de nos ressources maintenant que nous avons de partenariat avec d’autres partenaires extérieurs dans la situation de l’insécurité que le pays a connue à un moment c’était nécessaire de solliciter l’appui des partenaires. Mais en même temps solliciter l’appui des partenariats ne veut pas dire qu’on doit s’accrocher toute l’économie du pays qu’on doit tout laisser entre les mains de ces partenaires là. Le contenu du partenariat ça se joue à quel niveau sachant que nous avons des difficultés sur le plan national nos propres ressources on arrive pas à les exploiter. Les forces négatives sont souvent sur les sites qu’ils exploitent, peut être les produits vont à l’extérieur et c’est le pays qui s’apprauvrit davantage. Mais si en plus de cela que vous avez des gens que vous appelez partenaires venus vous aider pour rétablir la sécurité si en plus de cela ils se disent que c’est la raison suffisante de se servir de nos ressources, cela pose le même problème que les groupes armés et qu’elle est la distinction que nous faisons si les groupes armés occupent certaines portions du territoire et exploitent les ressources à leur guise et que vous avez des partenaires qui viennent au motif de rétablir la sécurité et qui occupent aussi un certain nombre de site qu’ils doivent exploiter, quel est le bénéfice que le gouvernement en tire ? Ces questions là on en débat avec le gouvernement mais on ne le crie pas sur les toits, on pense que le syndicat ne fait rien mais nous en discutons. Nous avons toujours pris les devants, si vous avez pris la lutte contre le l’aparteid en Afrique du Sud, qui soutient le gouvernement ? Dès que l’économie du pays est en danger sur le plan social ça ne marche pas tout de suite. Le SATU se détourne de la vision du gouvernement pour dire non. C’est ce que nous voulons faire mais en le faisant le gouvernement pense que c’est un acquis. J’ai déjà des partenaires qui ne vont pas revendiquer et ça c’est se tromper de vision, nous continuerons toujours à défendre les travailleurs ».

 

Pendant ce temps la souffrance des travailleurs est loin d’avoir un allié stratégique et de lutte pour inverser la tendance. Une victoire pour le régime de Bangui qui reste néanmoins éphémère.

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